Comme on le sait, les récits (ou histoires) de vie occupent une place de plus en plus importante dans les sciences sociales, mais aussi comme méthode de formation, d’éducation populaire, ou de thérapie en groupe, ou encore dans la littérature. Dans le même temps, ils suscitent de nombreuses interrogations, quant à la valeur scientifique de tels témoignages, que ceux-ci soient spontanés ou sollicités. De façon générale cependant, l’engouement actuel pour ces méthodes peut s’interpréter à la fois comme té oignant d’une propension actuelle vers une quête de sens, pour soi en tant qu’individu comme pour la société, mais aussi d’une évolution des sciences sociales vers une réflexion plus anthropologique, fondée sur une approche plus clinique et plus compréhensive. L’objet de cet ouvrage est donc de faire le point sur ces pratiques, tout en prenant en compte leur extrême diversité. Le récit effectué par un individu sur son histoire propre ouvre en effet à une compréhension, de l’intérieur, non seulement de cette histoire et de ce qui a contribué à la façonner, mais aussi de la société où elle s’est développée, celle où il s’est formé, où il a noué ses premières relations – autant d’éléments qui contribuent à la construction de son identité. C’est en effet de la capacité de comprendre en quoi l’histoire conditionne le présent que dépend la capacité de se projeter dans un avenir, que ce soit au niveau collectif ou individuel.
Vincent de Gaulejac, André Lévy (sous la direction de), Récits de vie et histoire sociale, Paris, ESKA, 2000